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p. 06 Construire un autre monde avec des technologies Web : A-Frame
p. 14 Donne un poisson à un chat ...
p. 16 Créez vos propres bibliothèques
p. 22 Des Giga-octets aux Gibi-octets
p. 24 Cluster MySQL 5.6 et bascule automatique avec mysqlfailover
p. 30 Orchestrez vos conteneurs Docker avec Docker Compose
p. 36 Mise en place de tests unitaires en Python avec unittest
p. 45 Modifiez un tableau html avec Greasemonkey
p. 48 Utilisation de Micmac pour la génération de modèle numérique d’élévation par traitement d’images acquises par microdrone
p. 58 Interfaces utilisateur en Python : le mode texte
p. 66 Wildfly Swarm
p. 72 Implémentez SRP en Javascript et PHP !
p. 79 Un service Web en 10 minutes avec Bottle
Connaissez-vous la Délégation générale à la langue française et aux langues de France (la DGLFLF de son petit nom) ? Non ? Alors pour votre plus grand bonheur, vous allez apprendre qu’il s’agit d’un service directement rattaché au ministre chargé de la culture et qu’il est composé d’une trentaine de personnes. Son objectif est, je cite, « d’animer et de coordonner la politique linguistique du Gouvernement et d’orienter son évolution dans un sens favorable au maintien de la cohésion sociale et à la prise en compte de la diversité de notre société ». Si j’ai décidé de vous parler de cette instance ce mois-ci, c’est suite à la publication de l’article « Vers une norme française pour les claviers informatiques », paru sur le site du Ministère de la Culture [1]. En résumé, ce texte nous explique qu’il est « presque impossible d’écrire en français correctement avec un clavier commercialisé en France ». Ainsi on ne peut pas (ou très difficilement si je me réfère à l’atténuation impliquée par l’usage du mot « presque ») utiliser :
Mais par quel miracle ai-je pu donc écrire tous les caractères qui précèdent ? Peut-être simplement en ayant correctement configuré mon clavier ? Je ne m’étais jusqu’ici jamais trop posé la question et j’ai donc découvert qu’il s’agit de la configuration « Français Français (variante) » :
Les différents caractères sont accessibles soit en appuyant simplement sur la touche, soit en la combinant avec la touche de verrouillage majuscule, avec <AltGr> ou avec <AltGr> + <Shift>. On peut donc en conclure que les éminents membres de cette institution n’ont pas configuré leur clavier correctement et que plutôt que de suivre une formation en informatique ou de s’informer auprès d’une personne compétente, ils ont préféré lancer un nouveau projet normatif auprès de l’AFNOR [2].
Plus grave, il paraît indispensable à la DGLFLF que ce nouveau clavier permette une utilisation aisée des différentes langues présentes sur notre territoire (langues régionales et étrangères), car on doit pouvoir recourir à plusieurs langues au sein d’un même document. Je me suis donc renseigné sur les langues régionales et étrangères présentes sur notre territoire en me basant sur les informations données par la DGLFLF :
On peut donc commencer à imaginer à quoi pourrait ressembler la touche A (en se limitant quand même dans le nombre d’alphabets). Pour accéder sur une même touche aux différents alphabets, il faudra alors utiliser des combinaisons de touches... Quel sera donc l’intérêt par rapport à ce que l’on peut faire actuellement ? Et que dire des symboles mathématiques ? Ils ne constituent pas une langue, mais il est fréquent de devoir utiliser des caractères du grec ancien. Il faudrait donc ajouter également cet alphabet et un ensemble assez conséquent de symboles. Pour la DGLFLF, les caractères « utiles » seraient « ≤ », « ≥ » et « ‰ ». Je propose donc de supprimer aussi les caractères « inutiles » tels que le pipe « | » (d’ailleurs sur un clavier standard de Mac, il faut un minimum de trois mains pour réaliser la combinaison de touches permettant d’accéder à ce caractère).
L’article [1] résume en fait la section II « Vers une norme française pour les claviers informatiques ? » du rapport au parlement sur l’emploi de la langue française [6]. Dans ce rapport, on est rassuré d’apprendre que sur un « système Mac » les utilisateurs « chevronnés » seront capables d’accentuer une lettre majuscule à l’aide de la touche de verrouillage majuscule. Ouf ! Donc dans la vraie vie, il y a les utilisateurs de Windows qui ne peuvent pas écrire correctement en français et les utilisateurs de Mac chevronnés qui y parviendront. GNU/Linux ça vous dit quelque chose ? Le noyau de Mac OS X n’est-il pas basé sur UNIX ? Au lieu de se dire que le problème vient du système d’exploitation ou de la méconnaissance des utilisateurs, lançons un vaste projet de création d’une nouvelle norme, c’est bien plus efficace !
Il faut noter que l’AFNOR se base apparemment sur ce rapport et non sur la déclaration de l’article [1] puisque son projet de normalisation se borne aux langues d’écriture latine. Je vous rappelle d’ailleurs à ce propos qu’il existe déjà une disposition de clavier adaptée à notre langue : le Bépo. Par contre, dans le contexte d’une utilisation multilingue, l’usage de cette disposition ne sera plus adapté. Les mots-clés des langages sont tirés de l’anglais et il serait donc plus intéressant d’utiliser un clavier Dvorak, car ces dispositions ont été pensées aussi pour minimiser la fatigue musculaire. Cela revient donc à modifier perpétuellement la disposition des touches ce qui, vous en conviendrez, ne serait guère efficace en terme de vitesse de frappe. Sans compter les problèmes inhérents à un changement de clavier (pour aider un collègue, pour les enseignants ou formateurs passant de machine en machine, etc.). Avez-vous remarqué le nombre de fautes de frappe que l’on fait lorsque l’on passe d’un clavier Azerty à un autre et que les touches sont décalées de quelques millimètres ? Imaginez donc avec des lettres se trouvant sur des touches « mouvantes » dont la disposition est complètement modifiée d’un clavier à l’autre.
Pour finir, en résumant tout cela à l’extrême, on en déduit qu’il est difficile d’écrire correctement en français sous Windows. Pour rappel, le ministère de l’Éducation nationale a signé un partenariat avec Microsoft et c’est bien ce ministère qui veille aux programmes appliqués dans les écoles, collèges et lycées, lesquels programmes contiennent également un apprentissage de la langue française... cherchez l’erreur ! Quant à nous, tant que nos claviers nous le permettent, nous pourrons continuer à administrer des serveurs, développer des applications et tester les techniques proposées dans les pages qui suivent. Je vous souhaite une bonne lecture...
Il y a deux mois nous nous insurgions de la signature du partenariat entre le ministère de l’Éducation nationale et Microsoft et nous apprenons donc maintenant que ce partenariat qui revient à « vendre » nos enfants à Microsoft et à ses suites logicielles ne leur permettra pas d’écrire en français alors que des solutions libres et fonctionnelles existent ! Dernièrement, les amendements déposés pour donner la priorité au logiciel libre dans le secteur public se sont transformés en un « encouragement » à l’utilisation des logiciels libres et des formats ouverts lors du développement, de l’achat ou de l’utilisation d’un système informatique malgré les actions de l’APRIL et le soutien de certains députés. Autant dire que bien qu’il existe des solutions pérennes et libres que vous, lecteurs de GNU/Linux Magazine, utilisez tous les jours, nous allons continuer à payer des délégations inadaptées qui imagineront d’autres normes aussi inutiles qu’elles sont incompétentes. Je vous souhaite tout de même une bonne lecture...
Tristan Colombo
[1] DGLFLFL, « Vers une norme française pour les claviers informatiques » : http://www.culturecommunication.gouv.fr/Politiques-ministerielles/Langue-francaise-et-langues-de-France/Politiques-de-la-langue/Langues-et-numerique/Les-technologies-de-la-langue-et-la-normalisation/Vers-une-norme-francaise-pour-les-claviers-informatiques
[2] AFNOR, « Projet de nouveau modèle de clavier informatique » : http://www.afnor.org/liste-des-actualites/actualites/2015/novembre-2015/respect-de-l-ecriture-francaise-vers-un-nouveau-modele-de-clavier-informatique
[3] DGLFLFL, « Langues régionales » : http://www.culturecommunication.gouv.fr/Politiques-ministerielles/Langue-francaise-et-langues-de-France/Politiques-de-la-langue/Langues-de-France/Langues-regionales
[4] DGLFLFL, « Langues des Outre-mer » : http://www.culturecommunication.gouv.fr/Politiques-ministerielles/Langue-francaise-et-langues-de-France/Politiques-de-la-langue/Langues-de-France/Langues-des-Outre-mer
[5] DGLFLFL, « Langues non-territoriales » : http://www.culturecommunication.gouv.fr/Politiques-ministerielles/Langue-francaise-et-langues-de-France/Politiques-de-la-langue/Langues-de-France/Langues-non-territoriales
[6] « Rapport au parlement sur l’emploi de la langue française », 2015 (la section II débute en p. 51) : http://www.culturecommunication.gouv.fr/content/download/129266/1410822/version/4/file/Rapport%20au%20parlement%202015.pdf
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